Pétrole à 60 dollars : Faut-il baisser les taxes sur les carburants ?

Publié le par fritih

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La première vague de vacanciers est partie sans trop sourciller. Ça râlait un peu dans les stations-service, mais fissa, nach la côte, la société des loisirs et des 35 heures a boosté les Français hors les villes. Pas question de réduire le budget auto, encore moins le budget vacances.

Pourtant la note est salée : 1,16 € le SP 95 ; le gasoil est à 1,04 €. C’est 10 % plus cher qu’en 2004, pour le premier et 22% pour le second. On n’atteint pas encore le niveau record de 2000 et 2001, mais on n’est pas bien loin.

Problème : 50 % des ménages gagnent moins de 22 560 € par an. Le carburant brûle 6% de leurs revenus. Compte tenu de la stagnation prévisible du pouvoir d’achat, faut-il alléger les taxes sur les carburants (77 % du prix)…pour que les Français puissent acheter autre chose ?

Non, répond Thierry Breton. Il n’est pas question de rétablir une TIPP flottante, comme le demandaient plusieurs députés l’année dernière : « Le lissage des prix obtenu par la variation de la fiscalité est peu perceptible par les consommateurs ». J.F. Copé surenchérit : « La TIPP flottante est trop chère pour une efficacité trop faible ».

Je partage l’avis des organisations écologistes et de quelques analystes (Goldman Sachs). Le pétrole va continuer d’augmenter. Il n’a pas encore atteint son niveau record de 94 $ le baril (deuxième crise pétrolière). Mais on y va. La priorité, c’est d’économiser l’énergie, pas de pousser à la conso.

1. La hausse du prix du pétrole me semble durable. Elle est structurelle. La demande de produits pétroliers s’accroît, l’offre n’est plus adéquate. Nos cadres ont déjà vécu trois crises pétrolières. Ils ne croient pas aux prévisions de Morgan Stanley pour qui il va y avoir un ralentissement de la croissance mondiale et qui pronostique un prochain effondrement des prix.
La demande ne cesse de croître. La Chine, l’Inde et les « dragons asiatiques » développent progressivement leurs parcs automobiles et leurs réseaux de transports (la demande chinoise, 8% de la consommation mondiale de pétrole, s’accroîtrait de 9 à 12 % par an). La demande américaine elle-même reste très soutenue, malgré la hausse des cours.
Du côté de l’offre, les capacités de production tournent déjà au maximum. Certes, la production russe a pâti des défaillances de Youcos. Les dix membres de l’OPEP (hors Irak) produisent à plein régime. Seule, l’Arabie Saoudite peut encore donner un coup de fluide. Mais la consommation quotidienne mondiale est de 86,4 millions de barils quand l’offre ne dépasse plus 83,8 millions de barils/jour. Si l’hiver est dur, les prix s’envoleront encore.

2. L’impact négatif sur le pouvoir d’achat et les risques d’inflation (répercussions sur les transports et les matières plastiques) sont évidents.
Pour le moment, ce sont surtout les professionnels qui sont touchés. Le fret et le transport aérien ? Jean-Cyril Spinetta, PDG d’Air France, rappelait que le surcoût de la facture carburant 2005/2004 représentait une augmentation de 33 % (en valeur, l’équivalent de toute une année de profits de la compagnie).
Idem pour la plasturgie dont les coûts de matières premières (impactés par la hausse du dollar) représentent une augmentation de 7 à 10 %.
Les ménages ? C’est surtout au début de l’hiver qu’ils feront leurs comptes. C’est le poste « fuel domestique » qui fera grise mine. En une année, les prix de vente moyens nationaux ont augmenté de 38,11 %.

3. Il aura fallu les deux précédentes crises pétrolières pour que les Français (industriels et ménages) découvrent les vertus des énergies alternatives et des économies de consommation. Le danger serait de relâcher cet effort.
Il y a fort à parier que, dans les prochaines semaines, plusieurs parlementaires déposeront des amendements pour plaider la baisse de la fiscalité. Ils plaideront pour des mesures sectorielles (agriculture, pêche, taxis, etc…), ainsi que pour des mesures de soutien aux ménages les plus pauvres.
Non, il ne faut pas se bercer d’illusions. L’Américain Goldman Sachs table sur un baril à 105 $. La bonne réponse à l’augmentation des prix, c’est d’affecter la fiscalité au développement des énergies nouvelles.

Nul doute que sur ce sujet, on débattra durement cet automne.

Publié dans Energie

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